Nos propositionsNotes

Note #1

La rémunération des présidents d’AAI et API

À l’initiative du Président de la République, le Gouvernement engage un « grand débat national » permettant de répondre au moins en partie aux « revendications » des « gilets jaunes ». Ce débat sera organisé par la Commission nationale du débat public (CNDP). En parallèle devront avoir lieu plusieurs réformes, dont l’une consacrée à la fonction publique, sur fond de réduction d’effectifs et de coûts.

Mais cette annonce est venue s’entrechoquer avec celle, dans le même temps, du montant de la rémunération de Mme Chantal Jouanno, Présidente de la Commission nationale du débat public depuis le 7 mai 2018. Ancienne conseillère régionale (2010- 2017) et vice-présidente du Conseil régional d’Île-de-France (2015-2017), secrétaire d’État chargé de l’écologie (2009-2010), ministre des sports (2010-2011), sénatrice (2011-2017), cette dernière se retrouve ciblée par les médias. En cause : le montant de sa rémunération de 14.710 euros bruts par mois, pour présider ladite commission.

Alors qu’elle a préféré se retirer du pilotage suite à la polémique et a proposé que sa rémunération soit révisée à l’occasion du grand débat, le sujet n’en finit plus de choquer. Pourquoi ?

Après de nombreuses critiques formulées à l’égard des autorités administratives et publiques indépendantes (prolifération d’autorités, disparités d’activités et de pouvoirs, manque de transparence quant à leurs recettes, leurs dépenses, leur fonctionnement, leurs objectifs), la loi n°2017-55 du 20 janvier 2017 est venue instaurer un statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes (AAI et API). Dans le souci d’une plus grande transparence, l’article 23 exige qu’à l’occasion de l’étude de la loi de finances, le Gouvernement rédige un rapport à destination du Parlement dans lequel il présente, autorité par autorité, le dernier exercice budgétaire connu en cours d’exécution et l’exercice suivant. Ce rapport, annexé au projet de loi de finances, comporte les rémunérations et avantages des présidents et membres de chaque autorité. C’est sur la base de ce document que les médias ont révélé le montant de la rémunération de Mme Jouanno.

Les autorités administratives indépendantes sont des institutions de l’État, dépourvues de personnalité morale, mais disposant de pouvoirs propres, chargées d’assurer la protection des droits et libertés des citoyens, de veiller au bon fonctionnement de l’Administration dans ses relations avec les administrés, ou de participer à la régulation de certains secteurs d’activités. Chaque AAI est instituée par la loi. Cette dernière fixe les règles relatives à sa composition et ses attributions. Elles sont actuellement au nombre de 19. Aux côtés des AAI figurent les autorités publiques indépendantes (API), qui bénéficient de la personnalité morale, au nombre de 7, pour un total de 26 autorités. Les rémunérations et indemnités sont fixées, en principe, par les textes réglementaires en application du texte de création de l’institution.

Sur le plan budgétaire, les AAI bénéficient d’une certaine indépendance. Celle-ci se décompose en trois volets : l’autonomie financière, qui concerne les ressources de l’autorité, l’autonomie de programmation et d’exécution budgétaire qui permet à l’autorité de concevoir et de conduire les dépenses qui lui paraissent nécessaires par rapport à l’exécution de ses missions, et l’autonomie de gestion budgétaire qui permet à l’autorité d’opérer concrètement des achats, conclure des baux, effectuer des paiements, etc. Le collège de l’autorité arrête le budget sur proposition de son président, lui-même ordonnateur des recettes et des dépenses. En outre, la loi exige que chaque autorité élabore annuellement un rapport, qu’elle adresse au Parlement avant le 1 er juin de chaque année, dans lequel elle rend compte de ses dépenses et activités. Ce rapport comporte notamment un schéma pluriannuel d’optimisation des dépenses afin de renforcer la « performance publique ».

Par ailleurs, la plupart des autorités échappent à l’application de la loi du 10 août 1922 relative à l’organisation du contrôle des dépenses engagées. Leurs dépenses ne sont donc pas soumises au contrôle a priori d’un contrôleur financier du ministère des Finances. En revanche, les comptes des autorités sont soumis au contrôle a posteriori de la Cour des comptes, ainsi qu’à celui du Parlement par le biais des commissions des finances des deux assemblées, à l’occasion de la discussion des projets de loi de finances et dans le cadre des travaux de contrôle des rapports spéciaux.

Fichiers

Publié le 22/01/2019

L'autrice

Béatrice Guillemont

Béatrice Guillemont

Secrétaire générale