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Pour une "Loi Sapin 3"

visant à renforcer la lutte contre la corruption et les autres atteintes à la probité

Les présentes recommandations sont le résultat des réflexions d’enseignants-chercheurs de plusieurs universités françaises, menées dans le cadre d’une collaboration entre la Chaire de droit des contrats publics de l’université Jean Moulin Lyon 3 et l’Observatoire de l’éthique publique, think tank présidé par le député honoraire René Dosière. Après la première loi Sapin du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, et dans le prolongement de la loi du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi Sapin 2, une nouvelle loi visant à renforcer la lutte contre la corruption et les autres atteintes à la probité, ou loi Sapin 3, s’impose.   Ce texte a essentiellement pour objectif de perfectionner les dispositifs déjà créés par la loi plutôt que d’en créer de nouveaux. Constitué de 5 titres, il entend ainsi conforter les missions de conseil et de contrôle de l’AFA (titre I), notamment à l’égard des acteurs publics, combler certaines lacunes en matière de transparence dans la commande publique et pour les contrats de vente des immeubles publics relevant du domaine privé des personnes publiques et renforcer les mécanismes d’exclusion de la commande publique (titre II), clarifier le régime de la CJIP et rendre plus attractif cet outil de justice négociée (titre III), améliorer l’encadrement des représentants d’intérêts (titre IV) et les contrôles déontologiques dans la fonction publique (titre V).   Ces recommandations s’inscrivent dans le prolongement de la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la corruption présentée par M. le député Raphaël Gauvain (n° 4586, enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale le 19 octobre 2021). Mais elles s’en écartent, rejetant notamment l’idée d’un transfert des compétences de l’Agence française anti-corruption à l’égard des acteurs publics à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, et la complètent, en suggérant par exemple d’élargir le champ de la transparence en matière de contrats passés par les personnes publiques ou d’améliorer le système des contrôles déontologiques dans la fonction publique.

Pour une
Stop Corruption concept on missing puzzle Par azrisuratmin

En réaction aux critiques portées contre la France quant à son retard dans la mise en œuvre de ses engagements internationaux et pénalisant son attractivité économique d’une part, et d’autre part, à la crise de confiance des citoyens à l’égard des décideurs publics, ébranlée par différents scandales impliquant des responsables politiques, un vaste chantier de réforme a été engagé il y a maintenant dix ans. De nouvelles institutions ont vu le jour : d’abord la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), créée par la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, puis les référents déontologues au sein de la fonction publique, avec la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, le Parquet national financier (PNF), créé par la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la fraude fiscale et à la grande délinquance financière, et enfin l’Agence française anti-corruption (AFA) créée par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi « Sapin 2 ». Cette loi a également créé un statut protecteur des lanceurs d’alerte, déjà renforcé par la loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 visant à améliorer la protection des lanceurs d'alerte, dite loi Waserman. Elle a également instauré un registre des représentants d’intérêts dont la gestion a été confiée à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a profondément renouvelé le cadre institutionnel des contrôles déontologiques dans la fonction publique portant sur la mobilité entre le secteur public et le secteur privé. 

Si ces évolutions ont été assez favorablement accueillies sur la scène internationale, en particulier par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les efforts de la France doivent se poursuivre pour consolider son attractivité économique, accroître les performances économiques et commerciales de ses entreprises à l’international et renforcer la confiance des citoyens en ses institutions. Le GRECO a ainsi relevé un manque d’investissement et la France n’est qu’une relative bonne élève, au 21e rang du classement 2022 de l’Indice de perception de la Corruption établi par Transparency International. Le pays reste exposé au risque de corruption. D’après les statistiques du service ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) et de l’AFA sur les affaires traitées par la police et la gendarmerie depuis 2016[1], on dénombre entre 600 et 800 infractions d’atteintes à la probité constatées chaque année, entre 2016 et 2021. 

Elles ont augmenté de 28 %, soit en moyenne de 5 % par an depuis 2016. Cette augmentation est, toutefois, à relativiser puisqu’elle peut éventuellement résulter d’une amélioration des dispositifs de détection de la corruption. Dans le même temps, elle souligne la nécessité de poursuivre les efforts de lutte contre la corruption du fait de la persistance des pratiques corruptives. Ces atteintes regroupent les infractions de corruption, de trafic d’influence, de prise illégale d’intérêts, de détournement de fonds publics, de favoritisme et de concussion. La hausse des atteintes à la probité est notamment liée à celles des infractions de corruption (+46 % sur la période), qui représentent près d’un tiers des atteintes à la probité. Dans 68 % des cas, il s’agit de corruption publique. La corruption active (17 %) est un peu plus souvent constatée que la corruption passive (12 %). 

À la suite d’une mission d’information de la commission des lois de l’Assemblée nationale portant sur l’évaluation de la loi Sapin 2, dont les conclusions ont été rendues le 7 juillet 2021, M. le député Raphaël Gauvain déposait une proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la corruption (n° 4586) reprenant certaines des cinquante propositions résultant de cette mission d’information. Les présentes recommandations s’en inspirent, mais seulement partiellement. Elles sont principalement le résultat des réflexions d’enseignants-chercheurs de plusieurs universités françaises, menées dans le cadre d’une collaboration entre la Chaire de droit des contrats publics de l’université Jean Moulin Lyon 3 et de l’Observatoire de l’éthique publique, think tank présidé par le député honoraire René Dosière. Ce texte a essentiellement pour objectif de perfectionner les dispositifs déjà créés par la loi plutôt que d’en créer de nouveaux. Il entend ainsi conforter les missions de conseil et de contrôle de l’AFA, notamment à l’égard des acteurs publics, combler certaines lacunes en matière de transparence dans la commande publique et les contrats de vente d’immeuble public relevant du domaine privé des personnes publiques, clarifier le régime de la CJIP, améliorer les contrôles déontologiques dans la fonction publique et l’encadrement des représentants d’intérêts.

 

Fichiers

Publié le 04/09/2023

L'auteur

Jean-François Kerléo

Jean-François Kerléo

Vice-président

L'autrice

Élise Untermaier-Kerléo

Élise Untermaier-Kerléo

Les co-auteurs

Cédric Bernard et François Lichère